30 décembre 2010
(Copyright Jacques Thomet)
Aucun homme censé, avant le maléfice,
Ne tiendra à jouer le rôle de Cassandre.
A la terreur chacun préfère l’artifice
De croire que le feu ne couve sous la cendre.
Dans la liste sans fin des qualificatifs
Dont on a, pour qualifier l’horreur, fait le jeûne,
On écarte : voyous, casseurs, ou inactifs,
Puisque dans les banlieues ce ne sont que des jeunes.
Pour avoir ignoré qu’avecque trois couleurs,
Le bleu le blanc le rouge, devant nos ennemis,
Son drapeau fut brandi, y compris par des Beurs,
La France hélas récolte, de son mépris le fruit.
Sur les tombes de nos héros, que nul ne crache.
Elles appartiennent à des pauvres plutôt qu’aux riches.
Si elles penchent vers la Mecque, il faut qu’on sache,
Que nos anciens féaux sont sortis de leur niche
Un matin de Quatorze, mais aussi de Trente-neuf,
Baïonnette en avant, prêts à se mettre en quatre,
Sans savoir que leur geste habillerait de neuf
Un pays à genoux qui ne sut pas combattre.
Qu’on me comprenne bien ! Les linceuls des martyrs
Baignent du même sang. Qui le dira impur ?
Dans le carré des morts côte à côte ils expirent.
Musulmans et Chrétiens, contre Hitler ils en furent.
Venez au cimetière, à Rougemont (du Doubs),
Où sur les deux milliers de combattants enfouis,
Aucune différence n’habite les clous
Qui rivent leurs tombes à l’amour de la Patrie,
A part ce grand détail, je vous prie de me croire :
Catholiques et Juifs reposent dans l’entrée,
Quand tous les fils d’Allah, Rachid, Ali, les Noirs
Sont à l’arrière, alors qu’ils sont majorité.
Pour éviter de confesser que tu me glaces,
Un dernier soubresaut, France, tout à coup hérisse
Mon cœur, mes tripes et ma peau, jusqu’à cette race
En train de finir en vulgaire pain d’épices,
Que le premier renard, surgi du fond des bois,
Viendra avaler, en pourléchant ses babines,
Tant ta faiblesse, insigne, transformera en rois
Tous ceux qui, à ta gloire, préfèrent la rapine.
Un siècle après Lafargue[1], son Droit à la paresse
Triomphe, et dévide jusqu’à l’ultime maille
La passion de l’effort dans la commune liesse
Que suscitait jadis le respect du travail.
Je plains nos enfants, sur qui tombera la tuile
De payer à jamais, avecque du vinaigre
La faillite de nos élus, qui au lieu d’huiles,
N’auront jamais été qu’un ersatz de la pègre.
(A suivre)
[1] Paul Lafargue – Le droit à la presse (1880)