ADIEU MA MONTBELIARDE ! par Jacques Thomet (page 5)

 

25 décembre 2010

(Copyright Jacques Thomet – 2010) 

Dans ma pauvre province[1], berceau de nos Lumière*, 

La porte reste ouverte, même quand on n’est pas là. 

Essayez en banlieue, vous aurez fort à faire. 

Les voitures brûlent. Ce n’est pas du cinéma. 

 

Dans les quartiers, des « jeunes » incendient les écoles 

Malgré les lois connues de notre République. 

On est censé apprendre, que si un jour on vole, 

Plutôt que de monter, bien vite on tombe à pic. 

 

Pour pallier les carences d’enfants sans parents, 

Qui les mettent bas pour les seules allocations, 

Un féal de l’Etat[2], n’osant montrer les dents, 

Paye leurs grands frères à enseigner ces leçons. 

 

Obéir à nos règles, comme pain quotidien, 

Laisse froid ces loubards qui le laissent rassir. 

Au stade de France, dois-je compter comme miens 

Ceux qui sifflent notre hymne[3], m’obligeant à m’enfuir ? 

 

L’éducation civique s’en va des programmes. 

La Marseillaise meurt, biffée à coups de gomme. 

Nos élus légifèrent avec du vague à l’âme, 

Mais, sans la trique, vous tomberez comme une pomme 

 

Déjà bien mûre, faute d’avoir été cueillie 

Par les hommes censés porter notre culture 

Contre les nostalgiques d’une anomalie 

Prête à qualifier nos chiens d’éléments impurs. 

 

A force d’être aveugles, nos politiques creusent 

Le lit d’une rivière, que l’on craint sans retour, 

Gonflée de turbulences, elle qu’on veut heureuse, 

Après tant de souffrances, jusqu’à la fin des jours. 

 

Apprendre, compter et lire, dans nos us et coutumes 

Visait à rendre égaux et les hommes et les femmes. 

Dans les cités ils raillent, et rayent d’un coup de plume 

Ces progrès des anciens qu’ils jettent dans les flammes 

 

De leurs autodafés. Pour y mettre le feu, 

Ils attendent un blanc seing de leurs buveurs de sang. 

Voltaire, Rousseau, Hugo, Céline, Proust, même Dieu 

Finiront eux aussi par être mis au ban 

 

De peuples épris du glaive, prêts à trancher la tête 

Aux fervents des Lumières, aux fils des libertés. 

Les carcasses d’autos préfigurent la bête, 

Ce Phénix d’un cauchemar, qu’on crut enterrée, 

 

Quand le régicide, de janvier quatre-vingt-treize 

Fit croire à notre peuple, qu’il sortait de la plèbe. 

Plus de deux siècles après, cet assassinat pèse 

Sur ceux qui souffrent d’être restés dans la glèbe. 

 

A l’époque, ils n’étaient que rares à s’émouvoir, 

A voir en Guillotin un vrai démon du pire. 

Si les gens des cités oublient tous leurs devoirs, 

Comment garderont-ils leurs droits sans en pâtir ? 

 

A force de plonger la tête dans le sable 

Pour ne pas voir, qu’en la demeure, gît le péril, 

L’autruche du pouvoir répondra donc coupable, 

Si sa cécité provoque une guerre civile.

(Suivra) 



[1] La Franche-Comté, espagnole jusqu’en 1678

[2] Xavier Darcos, alors ministre de l’Education, avait annoncé en janvier 2009 l’embauche de 5.000 « médiateurs de réussite scolaire » dans les cités pour apprendre aux jeunes l’obligation d’aller à l’école et d’étudier.

*Les frères Lumière, inventeurs du cinéma, sont nés à Besançon

[3] La Marseillaise a été sifflée durant tous les matches de football entre les Bleus et des équipes du Maghreb depuis 2002.

Une réponse à “ADIEU MA MONTBELIARDE ! par Jacques Thomet (page 5)”

  1. yves dit :

    J’en viens à apprécier de plus en plus ces alexandrins faisant appel au
    2ème ou 3ème degré de l’évocation …

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